L’époque de ma première Communion est restée gravée dans mon cœur, comme un souvenir sans nuages… Je dus entrer en retraite et pour cela devenir grande pensionnaire, couchant à l’Abbaye. Je ne puis dire le doux souvenir que m’a laissé cette retraite ; Je ne crois pas que l’on puisse goûter cette joie ailleurs que dans les communautés religieuses, le nombre des enfants étant petit, il est facile de s’occuper de chacune en particulier, et vraiment nos maîtresses nous prodiguaient à ce moment des soins maternels. Elles s’occupaient encore plus de moi que des autres, chaque soir la première maîtresse venait avec sa petite lanterne m’embrasser dans mon lit en me montrant une grande affection…. J’écoutais avec beaucoup d’attention les instructions que nous faisait Mr l’abbé Domin … C’était pour moi un grand bonheur d’aller avec les religieuses à tous les offices…

                 La veille du grand jour je reçus l’absolution pour la seconde fois, ma confession générale me laissa une grande paix dans l’âme et le Bon Dieu ne permit pas que le plus léger nuage vînt la troubler…
Le «beau jour entre les jours» arriva enfin, quels ineffables souvenirs ont laissés dans mon âme les plus petits détails de cette journée du Ciel !… Le joyeux réveil de l’aurore, les baisers respectueux et tendres des maîtresses et des  grandes compagnes…  Ce fut un baiser d’amour, je me sentais aimée, et je disais aussi : «Je vous aime, je me donne à vous pour toujours.» … Jésus et la pauvre petite Thérèse s’étaient regardés et s’étaient compris…
Au soir de ce beau jour, je retrouvai ma famille de la terre ; déjà le matin après la messe, j’avais embrassé Papa et tous mes chers parents, mais alors c’était la vraie réunion, Papa prenant la main de sa petite reine se dirigea vers le Carmel… Alors je vis ma Pauline devenue l’épouse de Jésus, je la vis avec son voile blanc comme le mien et sa couronne de roses… Ah ! ma joie fut sans amertume, j’espérais la rejoindre bientôt et attendre avec elle le Ciel !