Quel lien entre Thérèse et l’UNESCO ?

L’UNESCO a estimé que Thérèse, mondialement connue, mérite d’être déclarée Personnalité de l’année 2023, Femme d’Éducation, de Science, de Culture et de Paix. Un beau cadeau pour son 150e anniversaire.

De ce fait, des représentants de l’Unesco participaient – et participeront – officiellement aux commémorations organisées à Lisieux, Alençon, Paris, Lyon, Marseille (villes où Thérèse est passée lors de son voyage à Rome),  Bordeaux, lieu de naissance de Louis Martin, il y a 200 ans (22 août 1823) et ailleurs…

Faisons plus ample connaissance avec l’UNESCO.

Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture.

Elle a été fondée, comme l’ONU en 1945, après la guerre. Onu et Unesco sont 2 Institutions internationales complémentaires  qui ont pour but la Paix.

L’ONU cherche à réaliser ou à maintenir la paix entre les États par des moyens politiques, diplomatiques et parfois militaires. On connaît les armées internationales, les Casques bleus…

L’UNESCO veut instaurer la paix par des moyens  de coopération et d’échange entre les peuples dans les domaines de la science, de l’éducation, de la culture pour une meilleure connaissance réciproque, et donc de meilleures relations entre les nations.

Un de ces moyens concrets est précisément “la Commémoration d’événements historiques et d’anniversaires de personnalités à rayonnement mondial qui ont contribué au progrès de l’humanité.”

C’est à ce titre que Thérèse figure sur la liste des festivités pour l’année 2023.

Encore quelques précisions : L’Unesco siège à Paris.

Elle compte actuellement : 193 États membres (qui sont aussi à l’Onu), 12 États associés  (qui ne sont pas à l’Onu)et 1 État Observateur permanent : le Vatican. Il possède les mêmes droits   d’intervention que les autres États, mais il n’est ni votant, ni éligible à des fonctions.

Il faut noter que l’Unesco, comme l’Onu, parle toujours de membres ou d’États et pas de pays. Pour nous, État, pays, c’est la même chose.

Mais en fait le mot pays est très vague ; il peut désigner une région, voire une ville (quand on demande : tu es de quel pays ?), un paysage (un pays de marais, de plaine…). Et les traductions en langues étrangères en sont très compliquées.

Alors que le mot État représente la même réalité pour tous selon 4 critères :

            – une population stable,
            – sur un territoire bien délimité par des frontières, qualifiées inviolables ( ! ),
            – dans un cadre de gouvernement et d’administration normalement décrit dans une Constitution,       
            – et la capacité d’entrer en relation avec d’autres États. 

 Comment Thérèse est-elle arrivée à l’UNESCO ?

Nous allons suivre les différentes étapes de son parcours de Candidate

En 2020, comme tous les 2 ans, la Direction de l’Unesco a envoyé une lettre aux gouvernants des États membres, les invitant à présenter une ou 2 personnalités ou événements célèbres qui seront fêtés  en 2022 ou 2023.

1- Je ne sais pas dans quelle tête a germé l’idée de présenter Thérèse pour son 150e anniversaire. Toujours est-il que les 2 Sanctuaires de Lisieux-Alençonen sont les maîtres d’œuvre. On commence par tâter le terrain auprès de personnalités religieuses et civiles, depuis la base jusqu’ au sommet. Partout l’accueil est favorable. Selon le règlement, on sollicite 2 États amis qui vont parrainer la candidature, la soutenir à l’Unesco et organiser, eux aussi, des commémorations en l’honneur de Thérèse : ce sera la Belgique et l’Italie.

2- Les Sanctuaires établissent un dossier de candidature qui présente Thérèse, s’inscrivant  dans les objectifs de l’Unesco : Éducation, Science, Culture, Paix.

3- Parce que c’est une affaire d’État, le dossier est envoyé au Ministère des Affaires étrangères à Paris qui le valide sans problème, et le transmet à l’Ambassadeur de France à l’Unesco. (Mme Véronique Roger-Lacan, à l’époque) pour décembre 2020.

Et voilà, très officiellement, “Thérèse de Lisieux, présentée à l’Unesco, par l’État français et la Basilique de Lisieux, en proposition à la Commémoration de son 150e Anniversaire en 2023.”          
De la part de la France, ce choix de candidat peut surprendre : un État laïc présente une jeune religieuse, cloîtrée, “qui n’a rien fait” pour être reconnue Personnalité mondiale de l’année !

Écoutons, à ce sujet, 2 extraits de discours prononcés à Alençon lors de la fête jubilaire  du 8 janvier dernier :

Mgr Celestino migliore, Nonce apostolique en France :

La rencontre de ce matin est un peu particulière.
Il est singulier que, dans un pays de la laïcité, des Responsables de la société civile s’unissent aux fidèles de la communauté religieuse pour honorer la sainteté de certains de leurs citoyens. Il s’agit bien de la laïcité positive.                                  
Et pourtant, nous pouvons dire que les Saints sont précieux pour le développement et la cohésion d’une communauté locale. C’est pour cela que nous les aimons.
Nous aimons les Saints parce qu’ils ont fait et continuent de faire la beauté de l’Église et de la société, ils les ont rendues beaucoup plus humaines et agréables à vivre.                                                         

Sébastien Jallet, Préfet de l’Orne                      

C’est avec plaisir que j’ai répondu à l’invitation du Sanctuaire d’Alençon à l’occasion des 150 ans de la naissance et du Baptême de Ste Thérèse. En effet, contrairement à une idée reçue bien ancrée, le principe de laîcité n’engage pas l’État à ignorer ou méconnaître les Religions, mais il l’oblige à être neutre et à garantir la liberté de culte. L’État assure ainsi la liberté de chacun de croire ou de ne pas croire ; et je sais l’importance de la foi pour tant de nos concitoyens

4- A l’Unesco, notre Ambassadeur remet le dossier à la Directrice générale (Mme Audrey azoulay, Française). – 77 candidatures sont déposées par 48 États. Plusieurs Bureaux, Services et Commissions étudient les dossiers au cours de l’année 2021 et font des sélections  dans lesquelles nous trouvons toujours Thérèse sur la liste d’’admission. Le Vatican qui a toujours d’excellents diplomates, annonce sa reconnaissance certaine, dès le mois de mars où elle figure sur une 1e liste de “reçus”.

5- Finalement 67 dossiers sont validés par le Conseil exécutif qui est le gouvernement de l’Unesco (“un Conseil des ministres” de 58 États). Le Conseil publie cette liste qui sera présentée à la Conférence générale.

6- La Conférence générale (“le Parlement” de 195 États à l’époque) approuve à l’unanimité la liste des 67 candidatures (en novembre 2021). Et, de ce fait, l’Unesco s’engage à participer aux Commémorations qui auront lieu.

Le 4 décembre 2021, a lieu la réception officielle de la Reconnaissance de Thérèse à Lisieux.

Cette cérémonie était présidée par Mme Nicole Ameline, Déléguée de la France à l’Onu et mandatée pour représenter l’Unesco. Elle est bien connue dans le Pays d’Auge, puisqu’elle a été longtemps Députée de la Circonscription de Honfleur et elle est souvent présente aux grandes célébrations thérésiennes à Lisieux ; elle l’était encore fin avril.

Voilà comment  Thérèse figure sur la liste officielle des Commémorations :

150e anniversaire de la naissance de Thérèse de Lisieux, mystique (1873 – 1897)
(France, avec le soutien de la Belgique et de l’Italie)

Dans cette appellation, Thérèse est désignée : mystique. Qu’est-ce à dire ?

Quand on dit mystique, on pense spontanément phénomènes extraordinaires : visions, révélations, apparitions etc….ce qui n’est pas le cas de Thérèse – et ça ne fait pas forcément un mystique.

Qu’est-ce qui fait de Thérèse une mystique ?

Thérèse est une mystique en ce qu’elle a une connaissance très aigüe du Mystère de Dieu, particulièrement de sa Miséricorde :

A moi, il a donné sa Miséricorde infinie et c’est à travers elle que je contemple et adore les autres  perfections Divines !… Alors toutes m’apparaissent rayonnantes d’amour. –  Ms A, 83 v.

Elle a fait une expérience, très forte, dans son vécu, de l’action de Dieu-Amour Miséricordieux en quelques circonstances précises de sa vie : sa guérison par le sourire de la Vierge, sa 1e Communion, une fusion d’amour, sa Confirmation, accueil de l’Esprit-Saint, la grâce de Noël, la conversion de Pranzini, l’Appel : J’ai soif…, la blessure d’Amour après l’Offrande à l’Amour Miséricordieux…

Mais c’est, dans le cours ordinaire de ses journées, que Thérèse vit une profonde union à Dieu.

Mon ciel est de rester toujours en sa présence, (PN 32, Mon Ciel à moi) écrit-elle, faisant les actions les plus insignifiantes (ramasser une épingle) avec une immense charge d’amour pour Jésus et un recours constant à la Parole de Dieu qui prend vie en elle.                                                                 

Évidemment, ce que nous disons là est une parole de croyant, un acte de Foi.
Écoutons l’Unesco, un organisme neutre, définir Thérèse comme mystique :

Elle possède une connaissance éminente de l’idéal spirituel qui la fait vivre, “la Science de l’amour”, qu’elle proclame par sa vie, par  sa parole, par ses écrits. 
Et par là, Thérèse de Lisieux ouvre des chemins de réponse possible aux femmes et aux hommes   de ce monde en quête de sens, à la recherche de la paix personnelle et universelle.

Sur quels critères, s’est-on basé pour qualifier Thérèse à l’UNESCO ?                                            

Le Dossier a bien sûr retenu les objectifs généraux de l’UNESCO : E – S – C pour la Paix.           
Il a aussi fortement souligné un fait incontestable : la célébrité de Thérèse, sous 3 aspects :
une renommée très rapide : 1 an après sa mort (parution de l’Histoire d’une Âme en 1898).
une renommée universelle :
-par la traduction de HA en multiples langues ; dès 1901, ainsi que ses autres écrits ;
-par les témoignages de bienfaits en de nombreux pays, et auprès des soldats de la Guerre 14-18, toutes nationalités confondues ;

Une renommée non seulement durable, mais qui s’amplifie : en témoignent, entre autres, l’affluence des visiteurs et pèlerins à Lisieux et à Alençon et le courrier reçu dans ces Sanctuaires.
Les rédacteurs et intervenants ont également su répondre aux  préoccupations actuelles de l’UNESCO et cela a été fortement relevé à tous les niveaux de l’examen :

  1.  – Thérèse est une femme.

Et la promotion de la femme est une priorité absolue pour l’Unesco et aussi pour l’Onu. Voilà un extrait du rapport présenté au Conseil exécutif pour validation de la Candidature :

Cette Célébration contribuera à  apporter une plus grande visibilité et justice aux femmes qui ont promu, par leurs actions, les valeurs de la paix. Étant donné la célébrité de Thérèse de Lisieux dans la communauté catholique, la célébration de son anniversaire peut être une opportunité de mettre en valeur le rôle des femmes au sein des religions, dans la lutte contre la pauvreté et la promotion de l’inclusion, en ligne avec les objectifs de développement de l’UNESCO (Cf.ODD 1 et 16). Mgr Francesco Follo alors Observateur permanent de l’État du Vatican

Un mot souvent utilisé maintenant en parlant des femmes : l’inclusion, contraire de l’exclusion. Autrement dit : Égalité hommes / femmes.              
Les droits de la personne sont les mêmes pour tous : liberté – respect – instruction – salaires
La dignité des femmes, vecteur de paix, c’est aussi le souci du Pape François :

Si nous voulons un monde meilleur, qui soit une maison de paix et non une cour de guerre, il  faut avoir à cœur la dignité de toute femme. (Homélie 1er janvier 2023)

Thérèse est une femme ; elle est une femme jeune
Cela aussi a été relevé, dans le Dossier. En voici  2 extraits :

Femme, jeune, en 24 ans d’existence seulement, elle va comprendre ce qui fait l’essentiel de sa vie et de son rapport au monde, un itinéraire particulier qui ouvre à l’universel.

A travers son œuvre, elle pose un regard de femme sur la société, sur notre humanité. Dans l’audace de sa jeunesse, elle porte, comme un étendard, le flambeau de l’amour universel et de la paix offert à tous les peuples.

Notons que le Pape Jean-Paul II a déjà insisté, en 1997, sur le fait que Thérèse est une femme et une jeune, dans sa Lettre apostolique sur le Doctorat.

  1. – L’écologie

Dès son plus jeune âge, Thérèse est en relation avec la nature et les autres vivants, qu’elle aime,  qu’elle admire et qu’elle soigne.
Nous connaissons ce passage des Manuscrits : (Ms A, 14)

J’aimais à cultiver mes petites fleurs dans le jardin que Papa m’avait donné… Ils étaient pour moi de beaux jours, ceux où mon roi chéri m’emmenait à la pêche, j’aimais tant la campagne, les  fleurs et les oiseaux !

Et tant d’autres exemples : le soleil couchant sur la mer, les montagnes de Suisse , son chien Tom : malade, elle lui prépare des boulettes qu’elle lui donne à la main, ses oiseaux auxquels elle a donné des noms, l’élevage de vers à soie, les oiseaux trouvés morts sur la cour de récréation et qu’elle enterre…

Voici ce qu’en dit le Dossier de Candidature :

Ce rapport de Thérèse de Lisieux à la Nature s’enracine dans son message universel d’amour et se situe dans une écologie au service de l’homme. L’éducation reçue en famille l’a ouverte à ces principes de vie qui invitent les hommes et les femmes de bonne volonté à prendre soin de notre terre, de notre maison commune. Prendre soin de notre maison commune signifie également prendre soin des personnes avec lesquelles nous sommes en relation. Une maison commune est faite pour la rencontre de celles et ceux qui l’habitent et où il fait bon vivre dans le respect des traditions et des cultures. C’est l’écologie intégrale dont parle le Pape François dans sa 2e Encyclique intitulée “Laudato si” (Loué sois-tu).

En conclusion

Cette phrase extraite de la Déclaration de notre Ministère des Affaires étrangères, le jour de la  Reconnaissance de l’Unesco et qui a paru au Journal Officiel le 4 décembre :

 Le soutien du 150e anniversaire de la naissance de Thérèse de Lisieux consacre, d’une part, l’héritage et la mémoire de cette femme française et citoyenne du monde et [consacre], d’autre part, l’impact et la résonnance de sa vie et de sa pensée sur notre société contemporaine.

A Thérèse, le mot de la fin : 

Vivre d’Amour, c’est naviguer sans cesse,
Semant la paix, la joie dans tous les cœurs. ()
La Charité voilà ma seule étoile,
À sa clarté je vogue sans détour.
J’ai ma devise écrite sur ma voile :
Vivre d’Amour !  PN 17 – 8